Attention chef-d'oeuvre
Aujourd'hui est un jour faste!
Je tiens à vous faire partager ma joie, mais les mots me manquent devant une telle découverte:
Le
premier jalon de la longue carrière cinématographique du jeune Arnold
Strong, mister Univers en cette année 1969, qui réintégrera son
patronyme pour devenir star internationale puis gouverneur de
Californie quelques années plus tard.
Au risque de faire des envieux, je vais ici résumer le pitch de ce chef-d'oeuvre crypto-gay méconnu.
Hercule s'ennuie ferme dans son Olympe étriquée, et il tanne son
père Zeus pour que celui-ci le laisse libre d'aller s'amuser sur terre.
Au
son d'une musique de Sirtaki du meilleur effet, le royal daron se fâche
tout rouge et ejecte l'impudent en toge riquiqui par dessus les
cieux...Est-ce la fin de notre héros?
Non, car, intercédant pour
lui, 3 lascives créatures sur le retour et ayant un rien abusé du fond
de teint, émeuvent le vieux coeur paternel de Zeus, qui envoie un
bateau pour recueillir le naufragé.
Notre pimpant demi-dieux arrive
donc a New-York, où son étourderie et sa méconnaissance
provoquent moultes échauffourrées, avant que de se faire chaperonner par
un bon ami vêtu d'un improbable chandail rose, un rien maniéré, et à qui les basses font
cruellement défaut dans le spectre vocal...
Ce tendre et
désintéressé compagnon saura-t-il sauver le corps musculeux de notre
demi-dieu dans cette ville de tout les dangers?
Surtout que celui ci
ne pense qu'à tomber la chemise à la moindre scène pour exhiber son
corps d'athlète sous toutes les coutures, tout innocent mimi qu'il est
dans son jean muolant (devait pas y avoir sa taille)...
Vous le saurez dès que je trouve le courage de regarder 10 mn de plus de ce pure chef d'oeuvre, malheureusement seulement disponible dans une VF qui ne met pas en valeur l'intensité dramatique du jeu d'acteur du petit Arnold.
Bon, allez
N'ecoutant
que mon courage et le coeur débordant du sens du devoir, je n'hésite
pas à sacrifier mon soir de congé à l'esprit encyclopédique d'un vrai
défricheur des contrées perdues du 7eme Art, c'est ça aussi travailler
au LuX !
Je me tape donc la suite de l'incunable, et ne reculant
devant aucun défi, tente de vous en résumer la trame à vous, qui n'avez
pas la chance d'avoir en votre possession ce monument de poésie à 24
images secondes.
Nous retrouvons donc l'ingénu qui a troqué sa toge pure coton contre
un jean près du corps et un chandail juste assez moulant pour laisser
entrevoir sa beauté sculpturale (après avoir enfilé une marinière et un bonnet, devançant JP Gaultier de 30 ans dans le style).
Le
destin ne laissant que peu d'alternative aux enfants de dieux, c'est
donc sur un stade que nous retrouvons notre héros, après qu'il ait tour
à tour estourbi forces marins matois et remis à sa place un chauffeur
de taxi rétif.
Là, tout à son aise, il s'emploie à donner une leçon
d'athlétisme à l'équipe du coin, avant que de se faire remarquer par un
professeur d'université curieux, et sa charmante fille.
Toujours
flanqué de son accolyte rachitique et maniéré (le buddy-movie
fonctionne à bloc), notre héros découvre la vie des misérables humains
et la ville de New York, les plans s'enchaînent à un rythme d'enfer, ou
bien parfois prennent le temps de s'attarder longuement sur les
situations.
En exergue cette scène emblématique: alors qu'il effectue une promenade romantique avec la fille du professeur (elle
a délaissé tout naturellement son boyfriend pour succomber aux appats
irrésistibles et au physique sans faille de notre héros) dans central parc, le couple est attaqué par un grizzli de 400 kilos...
Le
combat est titanesque, toute la furie des forces de la nature transpire
de la fourrure synthétique et du figurant qui en est affublé, et c'est
avec peine, à l'issue d'une lutte sans merci de 2 bonnes minutes
qu'Hercule peut donner toute la mesure de l'étendue du Divin en
terrassant la bête devant l'oeil médusé de la police , alors que n'y
tenant plus, sa jeune amie se laisse aller à une syncope réparatrice..
C'est
à partir de ce moment qu'il entame la conquête de la renommée en
s'adonnant avec désinvolture à la pratique du catch pour faire bouillir
la marmite de l'appartement qu'il partage avec Bretzie, son petit
compagnon du début.
Aucune audace esthétique n'est épargnée, faux-raccord,
champ-contre-champ jour-nuit, élipse sidérante, regard caméra, zooom
avant approximatif, toute la panoplie du créateur qui ne craint pas
d'offusquer la morale esthético/bourgeoise par l'audace
formelle du chef d'oeuvre révolutionnaire.
Placé sous le double
signe de Benny Hill et de l'Agence tout Risque, le scénario alterne
tension, romantisme torride, complot divin, cascades et comédie, pour
culminer par une course-poursuite en char dans les rues de New-York,
quand notre héros prend les rênes pour voler au secours de sa bien
aimée menacée par la maffia.
Pour autant, notre divin héros
connaîtra les affres de la condition humaine à la suite d'un terrible
complot mythologique, et avec l'aide de ses divins copains, sauvera sa
fiancée officielle et son vrai ami, avant que de réintégrer son statut
de demi-dieu en plaçant sa tête fougueuse et coupable sous la main
tendue et midséricordieuse de son père fulgurant.
Toutes les bonnes choses ont une fin, et le fils de Zeus doit
regagner ses olympiennes pénates abandonnant du même coup ses amis
terrestre.
C'est abasourdi et malheureux comme une pierre que
Bretzie apprend la véritable nature de son divin ami quand celui-ci
monte au ciel, et le touchant monologue final, d'un Bretzie
solitaire au coeur brisé, à peine rasséréné par la voix de son
ami sortant du poste radio lui assurant qu'il serait toujours dans son
coeur (de la jeune fiancée il n'est plus question et elle disparait du scénario, prétexte conventionnel désormais inutile) tirerait des larmes à une pierre dans l'apologie de cette amitié virile.
Bon comme je suis sympa, je le prête.